Cet article fait suite à Le TDA/H (1) : comprendre le trouble.
Lorsque le Trouble du Décifit de l'Attention est détecté et avéré, et que l'élève est pris en charge par un.e neuropsychologue, la tâche de l'équipe enseignante consiste à mettre en place les préconisations. Lesquelles et comment ? Quelle attitude et quelles stratégies adopter vis-à-vis d'un élève atteint de ce trouble dont l'impact est extrêmement important sur toutes les activités et tâches cognitives ?
L'attitude à adopter
En relation avec les émotions
Le premier point est de ne pas identifier l'enfant ou l'ado à son trouble : il A un trouble, il N'EST PAS ce trouble.
Le second point est le renforcement positif immédiat, qui s'avère extrêmement bénéfique. Le sentiment d'auto efficacité grandit avec la valorisation immédiate lors d'une réussite. En effet
l'estime de soi d'un.e TDA/H est parfois si basse qu'il ou elle a le sentiment de tout rater au point de ne plus voir ses réussites.
Il est également important de ne pas relever systématiquement tous les comportements indésirables, afin de ne pas provoquer l'effet inverse qui
consisterait à alimenter ces mêmes comportements. Cela n'empêche pas le jeune d'être préalablement informé qu'on les voit tous.
Enfin, il est utile de travailler sur la motivation à la fois extrinsèque ( accomplir une tâche pour quelqu'un ou pour recevoir une récompense) ou intrinsèque (l'accomplir pour le plaisir
d'apprendre). Le feedback positif immédiat stimule cette dernière car elle aide le jeune à entrer dans un état d'esprit dynamique grâce auquel il réalise enfin qu'il peut s'améliorer en
corrigeant ses erreurs.
acceptation et engagement
De manière générale, il est pertinent d'apprendre à adopter une attitude de défusionnement avec les émotions, basée sur la thérapie d'Acceptation et d'Engagement (thérapie ACT : Acceptance and Commitment Therapy).
Le livre du psychologue et docteur en psychologie Mehdi LIRATNI : "Adapter la thérapie ACT, pour les enfants, les adolescents et leurs parents" (éditions Dunod, 2021) ouvre des pistes pour accepter le trouble et les souffrances qu'il cause afin de le gérer autrement.
La méditation de pleine conscience va également dans le sens de l'acceptation des pensées et émotions liées au trouble. C'est un outil de plus en plus recommandé.
Le cadre des aménagements et adaptations
Les aménagements et adaptations pédagogiques sont incontournables lorsqu'il subsiste des difficultés.
Leur mise en place se fait dans le cadre d’un PAP (Plan d’Accompagnement Personnalisé) au sein de l’établissement scolaire, sur la base d’un bilan fait par un professionnel (neuropsychologue), en concertation avec les parents, le médecin scolaire, l’équipe pédagogique et la direction de l’établissement.
Un PPS (Plan Personnalisé de Scolarisation) est possible lorsque la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) reconnaît le trouble comme un handicap cognitif. Cela peut donner lieu entre autres à un tiers temps pour les examens, à du mobilier adapté qui permet à l'élève de satisfaire son besoin kinésthésique tout en restant assis, voire à un accompagnement humain avec un.e auxiliaire de vie scolaire (AVS).
Adaptations et aménagements
Les aménagements pédagogiques peuvent être les suivants, ils diffèrent d'un élève à l'autre, selon les besoins et difficultés de chacun :
- Adaptation des devoirs (allègement, priorisation).
- Adaptation des documents qui doivent être dépouillés des distracteurs.
- Recours à des outils pratiques comme le clavier, la lecture vocale, les textes à trous...
Adapter les tâches
Les doubles tâches
La tâche la plus redoutable pour un.e TDA/H est la double tâche. En effet, chaque travail a ses préalables. Ainsi, un simple exercice de réécriture au brevet en 3ème du type : "Réécrivez ce passage à la troisième personne et en mettant les verbes au passé simple" sous-entend que l'élève est capable de repérer les mots (il doit donc maîtriser les classes grammaticales) qui doivent être modifiés, et qu'il connaît son passé simple sur le bout des doigts.
Que dire d'un commentaire de texte en 2de ou en 1ère qui sous-entend : 1) que le texte inconnu soit compris dès la première ou deuxième lecture ; 2) que les procédés soient maîtrisés — les connaître et savoir les repérer dans un texte . 3) que la méthode du commentaire soit acquise ! Les révisions de chapitres entiers, les devoirs longs et complexes avec une foule de questions, les lectures cursives avec fiche à réaliser... sont autant de tâches de très haut niveau pour un.e TDA/H.
En conclusion, l'idéal est de proposer une tâche juste assez difficile pour qu'elle représente un défi accessible pour l'élève, afin de ne pas surcharger sa mémoire de travail par des préalables non automatisées et de libérer de l'espace mental.
Se stopper pour vérifier et repérer les pièges
Dans ce contexte, la lecture de la consigne est un toujours moment délicat pour un.e TDA/H car son absence d'inhibition lui fait sauter des étapes. Il est bon, par conséquent, de marquer un temps d'arrêt pour s'assurer que l'élève a lu la consigne en entier, l'a comprise et peut la décomposer en sous-tâches.
La réalisation de la tâche elle-même requiert plusieurs "stop" : d'abord pour identifier la difficulté ("Là, il y a un participe passé conjugué avec être.") avant de donner sa réponse ; puis résister au piège ("Je réfléchis avant d'écrire : je dois accorder, je cherche le sujet.") ; enfin donner la réponse juste.
Comme on le voit, ce qui est naturel et implicite chez un élève neurotypique demande beaucoup d'énergie et de temps à un TDA/H.
faire métacogiter
La métacognition est une clé essentielle dans la réussite des apprentissages. Elle aide l'élève à prendre conscience de son fonctionnement cognitif pour savoir ce qui marche et ce qui ne marche pas pour lui.
Concrètement, on peut l'interroger sur la façon dont il a appris une leçon en menant avec lui un dialogue pédagogique, puis en élaborant ensemble, pédagogue et élève, une fiche de métacognition réutilisable : "Comment j'apprends". Les fiches de structuration du travail récapitulant la stratégie étape par étape, de manière explicite, sont tout aussi utiles et bénéfiques, surtout lorsqu'il s'agit d'apprendre à lire une consigne et à décomposer une tâche complexe en sous-tâches.
CRÉER DES CONDITIONS FAVORABLES AUX APPRENTISSAGES
- Pour favoriser la concentration :
Intimer à l'enfant TDA/H de se concentrer sera sans effet. En revanche, l'éloigner (ou éloigner de lui) tous les distracteurs le placera dans des conditions favorables, tout comme convenir d'un signal pour débuter une activité ou relancer son attention au cours de la réalisation.
- Pour la gestion du temps et la motivation :
Si l'élève connaît le "menu" de la séance pédagogique, le plan du cours, il en perçoit mieux la finalité, peut suivre la progression dans le temps et voir ce qu'il lui reste à faire. Une source de motivation supplémentaire !
Le time timer est un outil qui convient très bien aux TDA/H quand il n'est pas source de stress. Il permet de visualiser le temps alloué à une tâche, de prendre conscience du temps restant et de la fin qui approche (il y aura un moment de détente après, c'est très motivant !).
- Gérer l'hyperactivité :
Là aussi, ordonner à un.e élève TDA/H d'arrêter de bouger est souvent peine perdue. Par conséquent il est préférable de tolérer des débordements, d'autoriser quelques mouvements et déplacements pendant le cours, et de permettre la manipulation d'un fidget. Alterner les phases de concentration et de détente permet à l'élève de mieux se recentrer lorsque ce sera le moment.
Sources et références
Cet article a pu voir le jour grâce à deux formations que j'ai suivies en 2022 et en 2023.
L'une auprès de la neuropsychologue Laura BERTLEFF, fondatrice de Learning Brain. Laura a dispensé une formation très complète, à la fois théorique et pratique, au cours de laquelle elle a non seulement
partagé ses connaissances, son expertise et sa boîte à outils spéciale TDAH, mais aussi invité ses participants à appliquer sur eux-mêmes bon nombre de techniques utilisables avec les élèves. De
quoi mieux comprendre le TDA/H dans toutes ses dimensions et rendre tout enseignant plus efficace dans son travail avec un.e élève TDA/H !
L'autre auprès de Steve MASSON, chercheur et professeur en sciences de l'éducation au Laboratoire de recherche en Neuroéducation à Montréal (Québec) grâce à l'organisme IF Paris (Initiative et Formation Paris). J'y ai reçu des informations scientifiques et pédagogiques extrêmement éclairantes, et appris des stratégies d'optimisation des apprentissages que comme tous les participants, j'ai été amenée à tester sur moi-même afin d'en mesurer toute l'efficacité.
Pour en savoir plus :
- Site de l'INSHEA (Institut National Supérieur de Recherche et de formation pour l'éducation des jeunes handicapés et les ensignements adaptés) : Aménagements pour un TDAH.
- La chaîne Youtube de Steve MASSON : Cerveau et apprentissage
Auteure : Claire Legendre. Tous droits réservés.
© ClaireLearning - 25 octobre 2023
Crédit photo : Photos libres de droit Pixabay.
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